Page 8 - Vert-Mont - Un domaine au coeur de l

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1.1 -
Malmaison : le domaine de Joséphine
Le 21 avril 1799, Joséphine Bonaparte, née Marie Josèphe Rose Tascher de la Pagerie, jette son dévolu
sur le château de Malmaison, qu’elle acquiert pour la somme de 325 000 francs. Sa première lettre
connue rédigée depuis Malmaison est datée du 18 juin 1799. Elle semble vite goûter ce nouveau séjour
campagnard bien différent de sa maison parisienne, au point d’écrire à son ami Barras le 30 septembre
1799 en ces termes :
« J’étais venue à Paris, mon cher Barras, dans l’intention de vous voir, mais
j’ai appris à mon arrivée que vous aviez beaucoup de monde aujourd’hui. Je ne me présenterai donc
pas chez vous, mais faites-moi l’amitié de vouloir bien m’indiquer un jour, dans le courant de l’autre
décade, où je puisse vous voir un quart d’heure. J’aime mieux que ce soit le matin à déjeuner. Depuis
que j’habite la campagne, je suis devenue si sauvage que le grand monde m’effraie. (...) »
4
.
À son retour d’Égypte, Bonaparte confirme cet achat et devient ainsi le propriétaire du domaine.
Il semble lui aussi apprécier ce séjour et s’installe à Malmaison au lendemain du coup d’État du
18 brumaire (an VIII, 9 novembre 1799).
« Confiné dans les sinistres Tuileries, il aspire à vivre à la
campagne, et cette propriété que Joséphine a achetée en son absence lui convient à merveille ; elle
sera sa résidence de campagne jusqu’à l’automne de 1802 ; alors il occupera le château de Saint-
Cloud et n’habitera plus Malmaison qu’épisodiquement, resté le havre de Joséphine »
5
. Le couple
passe dans sa demeure de campagne trois années fort heureuses, bien loin de l’étiquette pesante que
l’Empereur imposera plus tard. Bonaparte convoque ses ministres tôt le matin, reçoit les consuls et
conseillers d’État l’après-midi, et entrecoupe ses journées de travail par des promenades à pied ou en
barque, des parties de chasse, des représentations de théâtre amateur, n’hésitant pas à s’installer sur
la pelouse pour travailler, au grand dam de Talleyrand...
La vieille demeure du XVII
e
siècle est transformée et agrandie par les jeunes architectes Percier et Fontaine,
présentés à Joséphine par les peintres David et Isabey. Ils projetaient de construire sur la colline une villa
à l’italienne et de transformer l’ancienne maison en communs, mais ils doivent se résoudre à « retaper »
le château existant, ce qui coûte 600 000 francs en dix-huit mois, soit le double du prix d’achat
6
.
À partir de 1802, les architectes se succèdent pour embellir Malmaison au gré des inspirations de
Joséphine, qui se passionne pour la décoration paysagère à l’anglaise. Les jardins sont redessinés, décorés
de statues et de fabriques, une grande serre chaude est créée (aujourd’hui la Petite Malmaison) qui
permettra à Joséphine de s’adonner à sa passion pour la botanique en abritant de nombreuses espèces
exotiques qu’elle contribue à introduire en France. Joséphine conserve la tour dominant le domaine, qui
abrite au premier étage un cabinet d’histoire naturelle qu’elle a racheté aux précédents propriétaires. Dans
des vitrines sont conservés des insectes, oiseaux et coquillages
7
. Le régisseur y logeait.
Une roseraie s’étend à gauche de la cour d’honneur
8
. Au-dessus, des serres sont disposées le long du
chemin creux qui descend du coteau, dit « chemin des fossés »
9
. Encore plus haut, en remontant vers
le lieu dit « La Garenne », une faisanderie est aménagée. Joséphine installe au nord du domaine, à
proximité du piquet de cavalerie
10
, une ménagerie si célèbre qu’elle fut un moment la rivale de celle du
CHAPITRE 1
4 Lettre à Paul Barras, dans Impératrice JOSÉPHINE, Correspondance, 1782-1814, textes réunis par Bernard Chevallier, Maurice Catinat,
Christophe Pincemaille, Paris, Payot, 1996, 420 p., p. 89.
5 CHEVALLIER Bernard, PINCEMAILLE Christophe, L’impératrice Joséphine, Paris, Presses de la Renaissance, 1988, 468 p.
6 Ibid., p. 72.
7 CHEVALLIER Bernard, Malmaison : château et domaine des origines à 1904, Paris, Réunion des musées nationaux, 1989.
8 GRAVEREAUX Jules, Les roses de l’impératrice Joséphine, Paris, Éditions d’art et de littérature, 1912.
9 Plan de Malmaison non daté. Domaine National de Malmaison et Bois-Préau.
10 Le bâtiment du piquet de cavalerie subsiste dans la propriété de l’IFP Energies nouvelles à l’angle de l’avenue de l’Impératrice-Joséphine et de la RN 13.