L'UGCAA se consacre d’abord à la répartition des denrées
        
        
          avant de s’intéresser à la création de marques coopératives et
        
        
          de fonder ses propres services techniques. Le 17 mars 1948 est
        
        
          créée l'Union générale des coopératives agricoles de céréales
        
        
          (UGCAC) qui est l’héritière directe de l'UCB et de l’Union
        
        
          nationale des coopératives de vente et de transformation du blé,
        
        
          une première tentative d'union fondée en 1929. Moins de trois
        
        
          ans après leur naissance, les deux unions du “boulevard Saint-
        
        
          Germain”, UNCAA et UNCAC, ont face à elles deux unions
        
        
          symétriques représentant la “rue d’Athènes”, l’UGCAA
        
        
          et l’UGCAC.
        
        
          CES DEUX UNIONS INSTALLENT LEUR SIÈGE SOCIAL AU 20 BIS,RUE
        
        
          LA FAYETTE À PARIS.
        
        
          Leurs représentants sont l’émanation pour
        
        
          la plupart de la droite catholique. Certaines coopératives sont
        
        
          issues des “paroisses” comme La Providence rurale et L'Avenir
        
        
          rural à Arras ou du catholicisme social à l’instar de La Providence
        
        
          à Reims. Cette dernière a pour devise
        
        
          
            Cruce
          
        
        
          
            et aratro
          
        
        
          , “Par la croix et par la charrue”, et
        
        
          pour ligne de conduite “Faisons nos affaires
        
        
          nous-mêmes, ne nous laissons pas adminis-
        
        
          trer”. Elles inscrivent leur action dans la mou-
        
        
          vance du
        
        
          catholicisme social,
        
        
          représentée
        
        
          par le vicomte Alain du Fou, le fondateur du
        
        
          groupe La Fayette.
        
        
          Propriétaire terrien angevin né en 1891, Alain
        
        
          du Fou est depuis les années 1920 l'un des
        
        
          dirigeants historiques du Syndicat agricole
        
        
          d'Anjou et de la Caisse syndicale de crédit mutuel agricole
        
        
          d'Anjou, dont son père, Georges, a été l'un des fondateurs en
        
        
          1902. En janvier 1929, Alain du Fou crée avec Pierre Hallé et
        
        
          préside l'Union des coopératives de blé (UCB) qui regroupe
        
        
          environ 150 organismes. Il s’agit de tirer le meilleur parti de
        
        
          la très bonne récolte de 1929-1930, qu'il est alors difficile de
        
        
          stocker, et de l'écouler en vendant à l’étranger si possible.
        
        
          Alain du Fou assume d’autres responsabilités impor-
        
        
          tantes comme celle de président de l’Union des coopératives
        
        
          de vente et de transformation de blé et vice-président de
        
        
          l’AGPB. En 1936, il participe à la création de l’ONIB en tant que
        
        
          membre du conseil central. Pendant l’Occupation, ce défen-
        
        
          seur du mouvement de la Corporation paysanne et spécialiste
        
        
          des questions de financement assume des responsabilités
        
        
          importantes à la tête du conseil central de l'ONIC. Il est
        
        
          nommé président de la Caisse nationale du crédit agricole
        
        
          (CNCA), le 18 décembre 1940.
        
        
          En 1945, il fait renaître l’AGPB de ses cendres et la préside
        
        
          les premières années. Celle-ci rassemble tous ses dirigeants
        
        
          d’avant-guerre mais aussi ceux de la Corporation nationale
        
        
          paysanne. Pourfendeur du principe de l'unicité des branches
        
        
          au sein de la FNCA, il fonde en mars 1946 la Fédération natio-
        
        
          nale des coopératives de céréales (FNCC), dont il établit
        
        
          le siège social 18, rue des Pyramides à Paris, où loge déjà
        
        
          depuis longtemps le siège de la puissante AGPB. Après avoir
        
        
          été le rénovateur du “groupe de la rue des Pyramides”, héritier
        
        
          spirituel de la “rue d'Athènes”, il va être l’architecte du
        
        
          groupe La Fayette.
        
        
          Sur le plan national, après 1945, Alain du Fou a de nom-
        
        
          breuses autres responsabilités. Cofondateur de la Banque
        
        
          française de l'agriculture et du Crédit mutuel dont il est admi-
        
        
          nistrateur de 1950 à sa mort – et a été, un temps, l'un des vice-
        
        
          présidents –, il sera aussi vice-président de la Fédération
        
        
          centrale de crédit agricole mutuel et membre en 1959
        
        
          de la chambre d’agriculture du Maine-et-Loire dont il est le
        
        
          doyen. Il décède le 15 octobre 1968.
        
        
          Première partie
        
        
          
            Le temps des fondateurs (1945-1961)
          
        
        
          Chapitre 3 -
        
        
          
            Retour à la bipolarité
          
        
        
          Aux racines d’InVivo de 1945 à nos jours  #
        
        
          
            38/39
          
        
        
          
            Arras, Reims et Landerneau,
          
        
        
          
            bastions coopératifs catholiques
          
        
        
          
            L'encyclique fondatrice
          
        
        
          L'encyclique Rerum novarum,
        
        
          promulguée le 15 mai 1891 par
        
        
          le pape Léon XIII (1810-1903),
        
        
          est le texte fondateur de la
        
        
          doctrine sociale de l’Église
        
        
          catholique. Il incite notamment
        
        
          les croyants à se grouper
        
        
          en association dans le cadre
        
        
          professionnel.
        
        
          “Par la croix et par la charrue”, devise historique de La Providence agricole (aujourd'hui Vivescia),
        
        
          qui annonce clairement l’identité et l’origine de l’entreprise.
        
        
          
            À Arras
          
        
        
          , la première coopérative de céréales, celle de la Grand'Place, située face au Marché aux
        
        
          grains, est fondée en 1903. Puis sont créées en 1910 la Capsem (semences) et en 1933 la Capcra,
        
        
          dirigée par Gabriel Ducroquet. Elles sont issues du syndicalisme agricole. À la fin des années
        
        
          1950, la Capcra dispose de douze centres de stockage pouvant entreposer 200 000 quintaux
        
        
          de céréales.
        
        
          Face à ces coopératives républicaines, la contre-offensive vient des “paroisses” qui, sous l’égide
        
        
          de
        
        
          l’abbé Arthur Leroy
        
        
          (1884-1957), fondent La Providence rurale (approvisionnement) le 12 juin
        
        
          1920 et L’Avenir agricole (céréales) le 21 juillet 1928. Appuyée après 1945 par le Crédit mutuel, L’Avenir agricole
        
        
          collecte plus de 130 000 quintaux en 1960, dépassant La Providence rurale. Le 1
        
        
          er
        
        
          juillet 1966, les deux coopératives
        
        
          catholiques fusionnent pour donner naissance à L’Avenir rural.
        
        
          
            En Champagne
          
        
        
          ,  Gustave de Bohan
        
        
          (1849-1928), agriculteur à Fresne-lès-Reims, fonde en 1894 le Syndicat agricole
        
        
          de la Champagne, dans la mouvance du catholicisme social. Ce syndicat fournit à ses adhérents
        
        
          essentiellement des semences et des outils, mais ne peut effectuer d’activités de commerciali-
        
        
          sation. C’est pourquoi Gustave de Bohan prend la décision de créer à Reims en 1927 La Providence
        
        
          agricole, qui se transforme en coopérative en 1934, ajoutant à ses statuts la possibilité de collecter,
        
        
          stocker, vendre et transformer les céréales de ses adhérents. Après 1945, sous l’impulsion de ses
        
        
          présidents successifs Robert Mangeard (de 1947 à 1975) – également président de l’UGCAF de
        
        
          1968 à 1970 – et Jacques de Bohan (de 1974 à 2004), ingénieur agronome et arrière-petit-fils du
        
        
          créateur, cette coopérative marnaise monte en puissance pour devenir notamment le premier
        
        
          malteur d’Europe. En 1991, en fusionnant neuf coopératives, Jacques de Bohan crée Champagne
        
        
          Céréales bientôt érigée au premier rang des coopératives céréalières d'Europe, aujourd’hui un des
        
        
          piliers d’InVivo.
        
        
          
            En Bretagne,
          
        
        
          la plus ancienne coopérative, Coopagri, a été fondée en 1911 par Augustin de Boisanger
        
        
          (1874-1914), dont l’engagement pour la cause paysanne s’inscrit dans le courant du catholicisme social. Cet
        
        
          agriculteur crée à Landerneau l'Office central des œuvres mutuelles agricoles du Finistère (OC), qui fédère
        
        
          dans l’entre-deux-guerres en Bretagne des coopératives d’approvisionnement et de collecte de céréales,
        
        
          de légumes et de pommes de terre. En 1960, chaque activité de l’OC prend son indépendance : le crédit
        
        
          donne naissance au Crédit mutuel de Bretagne, l’assurance à Groupama Bretagne et les activités écono-
        
        
          miques à Coopagri qui fusionne toutes les coopératives de l’OC en 1963.
        
        
          C’est le début de l’expansion. Coopagri Bretagne met en place des filières agroalimentaires et ouvre ses
        
        
          premières usines : produits surgelés (1962) et laiterie à Landerneau (1965). L’union coopérative bretonne
        
        
          rachète en 1968 à Socopa une usine de transformation de la viande. Les productions animales (porcs, bovins,
        
        
          œufs) et la collecte de lait prennent leur essor de façon spectaculaire alors que les usines d’aliments du
        
        
          bétail de Brest et Rennes tournent à plein régime. En 1972, elle ouvre à Châteaulin (29) le premier
        
        
          libre-service à destination des agriculteurs et du grand public. Lorsque l'enseigne Magasin Vert
        
        
          est créée en 1975, elle compte déjà 65 magasins. L’Union consolide ses structures. Les années 1980
        
        
          sont celles de la diversification et de la restructuration. En 1989, Coopagri et ses 40 filiales réalisent
        
        
          un chiffre d’affaires de 7 milliards de francs. La stratégie engagée est poursuivie et le Groupe
        
        
          renforce ses positions sur l’ensemble du territoire breton. Aujourd’hui Coopagri, devenue Triskalia,
        
        
          en 2010, est l’un des premiers groupes coopératifs de l’agroalimentaire français.
        
        
          
            Gustave de Bohan :
          
        
        
          
            un précurseur
          
        
        
          Descendant des comtes de
        
        
          Bohan, des nobles ardennais
        
        
          dont les origines remonteraient
        
        
          à 1187, ce catholique fervent
        
        
          porte le cilice et collabore
        
        
          à La Croix. Proche des chrétiens
        
        
          sociaux, il met l'action au
        
        
          service des idées chrétiennes,
        
        
          mutualise la vente de la laine
        
        
          des moutons de la Champagne
        
        
          pouilleuse, crée les Caisses
        
        
          rurales de crédit, les
        
        
          assurances mutuelles,
        
        
          puis la première coopérative
        
        
          régionale, La Providence
        
        
          Agricole de Champagne.
        
        
          
            Augustin de Boisanger